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Carnet noir. Le cinéaste iranien Dariush Mehrjui meurt poignardé

TRISTESSE Le réalisateur, qui a contribué à la reconnaissance du cinéma iranien à l’international, a été mortellement poignardé avec sa femme samedi près de Téhéran.

Le réalisateur iranien Dariush Mehrjui a été tué à coups de couteau samedi soir avec son épouse à leur domicile près de Téhéran, après une longue carrière qui a contribué à la reconnaissance du cinéma iranien à l’international.

Les circonstances de ce double meurtre restaient mystérieuses dimanche, les autorités iraniennes n’ayant fait état d’aucune arrestation.

Considéré comme l’un des plus grands représentants du cinéma iranien en qualité de réalisateur, producteur et scénariste durant six décennies au cours desquelles il a été confronté à la censure, avant comme après la révolution islamique de 1979.

«La vache»

Il avait notamment réalisé en 1969 «La vache», l’un des premiers films de la nouvelle vague du cinéma de son pays et récompensé par le Prix du jury à la Mostra de Venise en 1971.

Son épouse Vahideh Mohammadifar, qui avait 54 ans, était également scénariste et scénographe.

«Au cours de l’enquête préliminaire, nous avons constaté que Dariush Mehrjui et son épouse avaient été tués par de multiples coups de couteau au cou», a annoncé le chef de la justice de la province d’Alborz, à l’ouest de Téhéran, Hossein Fazeli-Harikandi, cité par l’agence Mizan Online.

Il a expliqué que le cinéaste avait envoyé vers 21 heures un message à sa fille Mona pour l’inviter à dîner à leur domicile à Karaj, une grande ville à une quarantaine de kilomètres de la capitale. Lorsqu’elle est arrivée une heure et demie plus tard, elle a découvert les corps de ses parents avec des blessures mortelles au cou.

«Incident triste et douloureux»

Le ministre de la Culture, Mohammad Mehdi Esmaïli, a déclaré dans un communiqué avoir demandé «des éclaircissements sur les circonstances de cet incident triste et douloureux».

Le quotidien «Etemad» a publié dimanche un entretien de la femme du cinéaste dans lequel elle annonçait avoir été récemment menacée par un individu et que leur domicile avait été cambriolé.

«Aucune plainte n’a été déposée concernant une intrusion illégale dans la villa de la famille Mehrjui et le vol de leurs biens», a précisé M. Fazeli-Harikandi.

«Créateur d’œuvres éternelles»

Dans son communiqué, le ministre de la Culture rend hommage à «l’un des pionniers du cinéma iranien» et «le créateur d’œuvres éternelles».

Né le 8 décembre 1939 à Téhéran, Dariush Mehrjui a étudié la philosophie aux États-Unis avant de retourner en Iran où il lance une revue littéraire et sort en 1966 son premier film, «Diamant 33», une parodie des films de James Bond.

Il réalise ensuite des films ayant une forte dimension sociale, dont «La vache» (1969), «Monsieur le naïf» (1970) ou «Le cycle» (1974), «Les locataires» (1987) et «Hamoun» (1990).

Après la révolution islamique de 1979, Dariush Mehrjui séjourne quelques années en France, où il réalise la docufiction «Le voyage au pays de Rimbaud».

Outre le cinéma, il traduit en persan des ouvrages de l’écrivain français d’origine roumaine Eugène Ionesco et du philosophe marxiste allemand Herbert Marcuse.

«Le cinéma est comme la poésie»

De retour en Iran, il triomphe au box-office avec «Les locataires» en 1987. Puis il signe en 1990 «Hamoun», une comédie noire sur vingt-quatre heures de la vie d’un intellectuel angoissé par son divorce et ses inquiétudes intellectuelles, dans un Iran envahi par les entreprises technologiques Sony et Toshiba.

Au cours de la décennie suivante, Dariush Mehrjui brosse des portraits de femmes dans les films «Sara», «Pari» et «Leila», ce dernier étant un mélodrame avec l’actrice Leila Hatami sur une femme stérile qui encourage son mari à épouser une deuxième femme.

«J’ai été grandement influencé par Ingmar Bergman et Michelangelo Antonioni», a-t-il expliqué dans un entretien à des médias iraniens.

«Je ne fais pas de films directement politiques pour promouvoir telle idéologie ou tel point de vue. Mais tout est politique […]. Le cinéma est comme la poésie, qui ne peut prendre partie pour personne. L’art ne doit pas devenir un outil de propagande», selon lui.

Souvent primés, la plupart de ces films avaient été projetés en 2014 au Forum des Images à Paris, au cours d’un hommage en sa présence.

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