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NOYAUZERONETWORK.ORG / GENEVA, SWITZ.
Moyen Orient. Chrétiens d’Orient en danger

TERREUR. Depuis un an, la Coordination Chrétiens d’Orient en danger n’a cessé d’alerter sur les risques de contagion de la situation en Orient.

Avec l’enfoncement du Levant dans la barbarie, nous commençons à en subir les répercussions en Occident, à travers des phénomènes comme la radicalisation et la banalisation du discours communautaire et religieux ainsi que la stigmatisation en retour des musulmans. La spirale enclenchée menace nos valeurs et nos sociétés: endoctrinement et conversions massives de jeunes, départ par milliers vers les terres du djihad et risques pour la sécurité nationale. Tant que les sanctuaires extrémistes ne seront pas détruits, les actes de violence sur nos sols iront en s’amplifiant.

Nos pays ont toujours un temps de retard et commettent des erreurs dont profitent nos ennemis, comme l’illustre l’épisode de la chute de Mossoul. Pour affaiblir le premier ministre chiite irakien al-Maliki, proche de Damas et de Téhéran, qui marginalise les sunnites, l’Occident lui refusa un appui aérien. La catastrophe stratégique et humanitaire qui s’ensuivit érigea Daech de simple pion régional en acteur mondial se jouant des grandes puissances, avec un territoire agrandi, un effectif de 30 000 combattants, multiplié par trois en quelques mois, dont de nombreux Occidentaux formés au pire, équipé avec du matériel militaire sophistiqué récupéré sur l’armée irakienne en déroute, des moyens financiers conséquents et un trésor de guerre dépassant désormais 3 milliards de dollars. La politique d’isolement de Damas pour ne pas renforcer le régime dictatorial de Bachar el-Assad, la mise au ban de l’Iran du fait des contentieux passés et de la question du nucléaire, la mise à l’écart de l’Égypte, en raison des critiques liées à la prise de pouvoir et aux méthodes musclées contre les Frères musulmans, le double jeu de la Turquie avec les mouvements terroristes, la non-prise en compte des risques pour le Liban et la Jordanie… tout cela conduit à l’impasse stratégique dont tirent profit les extrémistes et dont sont victimes les minorités notamment chrétiennes qui résident depuis deux millénaires dans la région.

Au rythme actuel, on annonce trois ans au mieux pour en finir avec cette gangrène. Peut-on se le permettre? Plus nous tardons à l’éradiquer, plus elle étendra ses ramifications dans le monde.

Nos gouvernements doivent revoir radicalement leur stratégie afin de détruire au plus vite les sanctuaires qui permettent, avec les moyens de communication modernes, de s’adresser à nos jeunes et à nos populations en toute impunité et nous exposent à des représailles massives sur notre propre sol.

La priorité absolue doit être la guerre totale contre Daech et ses affidés. Nous devons, dans cet objectif, monter une coalition internationale large, à laquelle devraient adhérer des pays réticents ou spectateurs, coalition capable de se projeter militairement sur le terrain et de nouer des alliances conjoncturelles même contre-nature dans ce seul but. La première guerre d’Irak menée par Georges Bush père est l’exemple qu’une coalition d’intérêts hétéroclites, à laquelle participait d’ailleurs la Syrie démonisée de Hafez el-Assad, pouvait se mettre en place.

Dans cette perspective, il est urgent:

– D’exiger de la Turquie de sortir de son double jeu avec Daech. Pendant longtemps, le trafic d’hommes, d’armes et de pétrole transitait sur son sol au vu et au su de l’appareil sécuritaire et dans le silence de l’Occident. Dans ses priorités stratégiques, la lutte contre les Kurdes et l’opposition au régime syrien passent avant Daech. Il est temps que la Turquie choisisse son camp. Si elle souhaite rester au sein de l’Otan, commercer avec nos pays, éviter les sanctions, elle doit s’aligner sur notre stratégie et s’engager concrètement contre les mouvements extrémistes.

– Que certains pays du Golfe rompent leurs liens financiers et doctrinaux avec les mouvements extrémistes.

– Que l’Iran chiite, dont la confession est prise pour cible par les mouvements extrémistes sunnites au Moyen-Orient, soit intégrée à la coalition internationale sans attendre qu’aboutissent les négociations du groupe 5 + 1 sur l’usage du nucléaire.

– Que la Russie, qui s’est décrétée protectrice des orthodoxes qui représentent 80 % des chrétiens orientaux, soit associée à cette lutte contre le terrorisme islamique malgré les différends avec le gouvernement de Poutine sur la crise ukrainienne.

– Que l’Occident, qui ne peut s’appuyer seulement sur l’opposition syrienne faible et divisée, revoit son logiciel dans ce pays. En effet, ne pas avoir d’alliés militaires crédibles et solides pour porter le combat sur le terrain est un terrible handicap si on veut éradiquer les djihadistes. Il faut avoir le courage de reconnaître que le régime dictatorial de Bachar el-Assad, après avoir tiré parti de l’émergence des mouvements extrémistes, est désormais un rempart, quitte à remettre sur la table, le moment venu, les plans d’instauration d’une réforme politique de grande ampleur. En attendant, il ne faudrait pas jouer la chute du régime qui aurait des conséquences géostratégiques incalculables permettant aux mouvements djihadistes de s’emparer du pouvoir et de déstabiliser ensuite deux États fragiles, la Jordanie et le Liban.

– Il faut aider le Liban à résoudre la question des 2 millions de réfugiés syriens qui portent atteinte à sa cohésion nationale, aux équilibres entre les confessions, et qui doit affronter sur son propre sol des mouvements djihadistes. Pour contrer la spirale prévisible de la déstabilisation, le renforcement de l’armée libanaise par la livraison des 3 milliards de dollars d’équipements français payés par l’Arabie saoudite est un préalable. La France devrait aussi positionner un porte-avions en Méditerranée afin d’intervenir rapidement en cas d’escalade. Enfin, il est urgent que la France, l’Union européenne et l’ONU interviennent pour que les échéances électorales soient respectées afin qu’un président de la République chrétien maronite représentatif soit élu par le Parlement comme le prévoit la Constitution.

– La Jordanie doit être soutenue et renforcée militairement afin de pouvoir faire face aux menaces extrémistes qui risquent de fragiliser la monarchie hachémite.

– L’Égypte, enfin, doit être pleinement intégrée à cette coalition. Menacée sur sa frontière est, en particulier dans le Sinaï, et sur sa frontière ouest en raison de l’instabilité de la Libye, en train de tomber entre les mains de groupes armés, elle est un verrou stratégique essentiel dont la défaillance contribuerait à favoriser la jonction redoutée entre l’Orient aux mains de Daech et l’Afrique du Nord, et le Sahel, terrains de chasse d’al-Qaida.

L’Occident n’a plus le choix. Il doit opérer une révision déchirante de sa stratégie et de ses alliances. Il en va de sa sécurité et de son avenir. *

 

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