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Athènes jadis, Israël aujourd’hui

ATHINA L’historien grec Thucydide rapporte dans son œuvre, consacrée aux guerres du Péloponnèse (431-404 av. J.-C.) ayant opposé Sparte à Athènes, l’opération punitive conduite par Athènes contre la cité de Mélos, qui se situait dans sa sphère d’influence, mais qui souhaitait garder sa neutralité dans le conflit. À l’issue d’un débat dont Thucydide retrace le fil, Athènes prit la décision de tuer les hommes de Mélos et de réduire en esclavage les femmes et les enfants.

Il fallait faire un exemple: Athènes ne pouvait tolérer que Mélos ne se range pas à ses côtés, au risque d’être perçue comme faible par ses ennemis. Des valeurs comme la justice ou l’humanisme, cultivées par Athènes, cité démocratique, n’avaient à être respectées que sur le plan de la gestion intérieure, pas dans les relations avec les autres cités, auxquelles il fallait inspirer la peur pour garantir sa sécurité.

Dans la guerre menée à Gaza par Israël, les uns défendent Israël au nom du droit à l’autodéfense, les autres la critiquent en raison d’une riposte disproportionnée causant de nombreuses victimes innocentes, ainsi que cela fut le cas lors de l’attaque du Hamas le 7 octobre. On nous a aussi expliqué qu’Israël se devait de rétablir face à ses ennemis sa force de dissuasion, mise à mal par l’action du Hamas. On se retrouve ainsi dans un schéma analogue à celui d’Athènes: en situation de guerre, la force et la terreur prévalent sur toute autre considération, même pour une démocratie.

Il y a cependant une grande différence entre les deux époques: le droit international n’existait pas dans l’Antiquité, pas plus que les valeurs universelles des Lumières, les droits de l’homme, le droit humanitaire. Or, Israël s’inscrit dans le droit international, elle doit même sa légitimité (incontestable!) à une décision des Nations Unies de 1947. En se livrant à Gaza à des représailles collectives à une large échelle, en causant des dizaines de milliers de victimes civiles innocentes, plongées dans le dénuement et la famine, elle viole les règles de l’ordre international et se décrédibilise aux yeux du monde – de même qu’elle décrédibilise l’Occident qui la soutient majoritairement.

En ce sens, l’arrêt de la CPI, porté contre des dirigeants tant d’Israël que du Hamas, souligne que les uns comme les autres ont dérogé aux règles de cet ordre international, sous réserve que les accusations soient confirmées lors du jugement à venir. Les États-Unis (sans parler d’Israël) ont indiqué que cet arrêt était scandaleux: c’est bien plutôt une telle déclaration qui est scandaleuse et inconséquente!

Jacques Morard

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