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Dans la région chinoise de Xinjiang, des logiciels espions dans les smartphones des touristes

ABEILLES. Des centaines de voyageurs se rendant dans la région de Xinjiang se font installer, à leur insu, un logiciel sur leurs smartphones permettant aux autorités de récolter leurs données personnelles, selon l’enquête de cinq médias internationaux.

Dans la vaste province de Xinjiang, à l’ouest de la Chine, l’oppression du gouvernement communiste ne cesse de s’étendre. Montagneuse et désertique, la très controversée région nordique s’apparente à l’État police de l’Empire du milieu, et ce au nom de la lutte contre le terrorisme islamiste. Si le système d’oppression ne concernait jusque-là que les habitants de la région, il semble qu’il s’étend désormais aux touristes et autres visiteurs en provenance de la Chine centrale, et du Kirghizistan, ancienne route commerciale entre l’Empire du milieu et la Méditerranée.

Une enquête menée par un consortium de cinq médias internationaux, dont The Guardian et le New York Times, révèle qu’à la frontière Irkeshtam, les douaniers chinois installent un logiciel espion sur les smartphones des touristes et visiteurs, et ce à leur insu. Selon les autorités chinoises, près de 100 millions de personnes visitent chaque année la région de Xinjiang, connue notamment pour son ingéniosité dans la lavande.

«Les abeilles collectent le miel»
Prétextant un contrôle routinier, les douaniers demandent aux visiteurs de leur donner brièvement leur portable et en profitent ainsi pour installer secrètement l’application, dénommée «Les abeilles collectent le miel». Si cette dernière est, dans la plupart des cas, désinstallée avant que le portable ne soit donné de nouveau à son utilisateur, certains visiteurs ont pour leur part découvert l’application toujours installée dans leur smartphone. Les installations confirmées par le quotidien britannique et ses partenaires étaient sur des téléphones Android, mais certains voyageurs rapportent que des iPhone ont également été demandé par les douaniers.

Une équipe d’experts du Citizen Lab de l’Université de Toronto, de l’Université de la Ruhr à Bochum et du quotidien britannique ont analysé l’application installée sur le téléphone d’un touriste afin d’en comprendre le fonctionnement. Selon l’enquête, le logiciel collecte les données personnelles des touristes, tels que les messages, les contacts ou les notes vocales, et a la capacité de suivre leurs déplacements. Mais la surveillance va plus loin, et elle est surtout plus organisée, puisque l’application est également programmée pour rechercher dans l’historique internet du téléphone, et dans ses contenues multimédias, des données pouvant correspondre à un des 73.000 éléments contenus dans la liste noire du gouvernement.

Cette dernière regroupe les contenus jugés problématiques par le gouvernement chinois, car pouvant être assimilés à l’État Islamique. Des images d’exécutions, des publications d’Al-Qaida, des recherches d’armes mais aussi des données qui pourraient pourtant s’apparenter à de simples activités religieuses ou pratiques musulmanes. Sont également répertoriés dans la liste: une photo du Dalaï-Lama et un dictionnaire arabe. Pour Pékin, les groupes terroristes prennent leurs quartiers dans les pays d’Asie Centrale afin de pouvoir attaquer plus facilement la Chine

Surveillance de masse et «camps de détentions» à ciel ouvert
Le gouvernement chinois règne d’une main de fer sur la province de Xinjiang et exerce une surveillance technologique accrue sur ses habitants, avec l’installation ces dernières années de caméras à reconnaissance faciale dans les rues commerçantes et dans les lieux de cultes musulmans, mais également l’utilisation de fichage ADN et méthode de géolocalisation dans les téléphones. Cette année, Human Rights Watch (HRW) a dévoilé les subtilités d’une application pour smartphone utilisée par la police du Xinjiang afin de regrouper les données personnelles de ses citoyens.

Au nom de la lutte contre le terrorisme islamiste, la région contient depuis quelques années des dizaines de «camps de détentions», dans lesquels des centaines de milliers de Ouïghours, un groupe ethnique turc, et des minorités musulmanes sont retenus captifs pendant des semaines, voire des mois . Mais du côté des pouvoirs publics, le langage est tout autre: les autorités parlent de «centres de formation» volontaires destinés à renforcer l’employabilité des habitants et à les éloigner de toute tentation de radicalisation, tandis que certaines organisations internationales n’hésitent plus à les qualifier de «camps de concentration».

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