« Sarajevo Safari » : une enquête ouverte en Italie sur des « touristes de guerre » snipers lors de la guerre en Bosnie
HONTE Près de 30 ans après les accords qui ont mis fin à la guerre de Bosnie, le parquet de Milan a ouvert une enquête contre X pour « homicide volontaire aggravé ». Elle vise des ressortissants étrangers, soupçonnés d’avoir payé l’armée serbe pour aller tirer sur des civils, le temps d’un week-end, lors du siège de Sarajevo.
Presque 30 ans après la fin de la guerre de Bosnie, une enquête ouverte en Italie, nous replonge dans les horreurs du siège de Sarajevo. Le parquet de Milan cherche à identifier des Italiens soupçonnés d’avoir participé aux massacres de civils lors du siège de la ville et d’avoir pris part à ce que l’ancienne maire de Sarajevo décrit comme « des safaris », ciblant des hommes, des femmes et des enfants. Sarajevo Safari (Nouvelle fenêtre)est d’ailleurs le titre d’un documentaire qui a convaincu l’ancienne maire de remuer le passé et de saisir la justice sur le cas de ces « touristes de guerre ». On parle de dizaines, voire de centaines de visiteurs étrangers qui auraient monnayé auprès des forces serbes le droit d’aller jouer à la guerre le temps d’un week-end, et d’aller jusqu’à prendre la place des snipers pour tirer sur des civils depuis les collines qui entouraient Sarajevo.
Après une première plainte déposée en Bosnie, l’ancienne maire de Sarajevo, Benjamina Karic, a contacté un journaliste italien pour le mettre sur la piste de participants à ces opérations macabres. Ezio Gavanezzi commence à enquêter et il explique au quotidien La Reppublicca, qu’au moins une centaine de ces « snipers du week-end » seraient italiens. D’après lui, il s’agirait de sympathisants d’extrême droite, passionnés d’armes et fortunés, qui se retrouvaient à Trieste, dans le nord de l’Italie, avant d’être conduits par des miliciens serbes jusqu’à leurs positions, sur les hauteurs de Sarajevo. Contre des sommes allant jusqu’à l’équivalent de 100 000 euros par jour, ces « touristes de guerre » pouvaient passer le week-end sur les collines au milieu des soldats, et gagnaient le droit de s’installer derrière des fusils de précision pour tirer sur les civils de la ville assiégée.
Des images confirment qu’il y a eu des « visiteurs »
Ces accusations paraissent suffisamment crédibles pour convaincre le procureur de Milan d’ouvrir une enquête pour « homicide volontaire aggravé ». Ces éléments s’ajoutent à des témoignages qui s’accumulent depuis des années sur la présence de « visiteurs » sur les lignes serbes. Des journalistes l’ont constaté visuellement et des images de l’époque le confirment. Une archive sidérante(Nouvelle fenêtre) montre même l’ancien dirigeant serbe de Bosnie, Radovan Karadzic accueillir au milieu de ses troupes, l’écrivain russe Edouard Limonov, rendu célèbre en France par le livre d’Emmanuel Carrère. La discussion est filmée. On voit Limonov s’installer derrière un fusil-mitrailleur en position de tir, du haut de ces collines où les snipers ont sévi durant quatre ans. Le siège de Sarajevo fut le plus long de l’histoire moderne et a conduit à la mort d’au moins 11 000 civils.

