Doha : les pays moins avancés dénoncent des pressions dans le sprint final

La prolongation du protocole de Kyoto se conclurait pour une période de huit ans, et non pas de cinq comme le demandent les pays en développement. Les négociations devraient se poursuivre dans la nuit de vendredi 7 décembre.

Par Laurence Caramel Publié le 07 décembre 2012 à 16h27 - Mis à jour le 07 décembre 2012 à 16h27

Temps de Lecture 4 min.

Des militants écologistes à Doha, vendredi 7 novembre.
Des militants écologistes à Doha, vendredi 7 novembre. AFP/KARIM JAAFAR

L’heure des derniers marchandages a sonné à Doha. La 18e conférence des Nations unies sur les changements climatiques doit – si l’agenda officiel est respecté – s’achever vendredi 7 décembre. Mais à la mi-journée, tout laissait penser que les négociateurs allaient jouer les prolongations dans la nuit de vendredi à samedi. Voire au-delà.

Plusieurs délégations, dont celle de la Gambie, au nom des quarante quatre pays du groupe des moins avancés (PMA) ont dénoncé des pressions pour boucler les négociations dans les temps.

"Nous n’acceptons pas de devoir nous presser, nous représentons des millions de personnes qui souffrent du changement climatique, nous ne rentrerons pas chez nous sans rien obtenir de satisfaisant", a déclaré leur représentant lors de la réunion informelle convoquée pour dresser l’état des lieux des discussions.

"BEAUCOUP D’ENTRE VOUS DOIVENT PRENDRE L’AVION"

Le président de la conférence, Abdullah bin Hamad Al-Attiyah, a rejeté ces critiques en plaisantant : "Je ne mets aucune pression. J’habite à 10 minutes d’ici en voiture et je serais ravi de vous garder, mais on me dit que beaucoup d’entre vous doivent prendre l’avion demain."

La commissaire européenne au climat Connie Hedegaard s’est toutefois impatientée en demandant que les textes de négociations soient transmis au niveau ministériel pour qu’une discussion politique puisse s’engager sur les multiples points qui font encore l’objet de divergences.

Des options de compromis commencent cependant à se dessiner. La prolongation du protocole de Kyoto devrait se conclure pour une période de huit ans et non pas de cinq comme le demandent les pays en développement. En échange, l’Union européenne, l’Australie, Norvège, Monaco et le Liechtenstein, seuls pays à s’engager dans cette seconde période, accepteraient en milieu de parcours de reconsidérer leurs promesses de réduction de gaz à effet de serre.

Abdullah bin Hamad Al-Attiyah, vice premier ministre du Qatar et président de la conférence.
Abdullah bin Hamad Al-Attiyah, vice premier ministre du Qatar et président de la conférence. REUTERS/FADI AL-ASSAAD

La date de 2014 ou de 2016 est en discussion dans le texte. Les pays en développement tentent également d’imposer un cadre à cet objectif de révision, en exigeant que les pays industrialisés en question fassent au moins un effort compris entre 25 % et 40 % de réduction, conformément aux recommandations faites par le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Une cible compatible, selon les scientifiques, avec l’objectif de contenir la hausse moyenne des températures mondiales à 2°C.

L'"ACTIF" DE L'EX-BLOC DE L'EST

La discussion reste vive sur le sort des crédits carbone non utilisés durant la première période d’engagement du protocole de Kyoto et qui, pour la Pologne, la Russie et quelques autres pays de l'ex-bloc de l’est, constituent un "actif" qu’ils ne sont pas prêts à brader. La coalition des petites îles et les PMA continuent de faire de l’élimination de ce surplus d’"air chaud" une condition incontournable pour parvenir à un accord à Doha. Conserver cette "monnaie" en circulation conduirait pour eux à affaiblir encore en peu plus l’impact des engagements pris par les pays industrialisés, dans la mesure où la Convention permet aux pays "excédentaires" de vendre leurs crédits aux pays ne parviennent pas à atteindre leurs objectifs.

Cela ne serait pas possible pour l’Union européenne dont le paquet énergie-climat interdit ce genre de transaction jusqu’en 2020. Après de longues discussions au sein de la délégation européenne, Connie Hedegaard devait proposer un compromis – accepté par la Pologne – consistant à acter un report total des crédits sur la seconde période du protocole de Kyoto, mais à en limiter la cession à 2,5% du volume. Les Vingt-Sept s’engageraient dans une déclaration politique à ne pas en acheter.

La commissaire européenne au climat, Connie Hedegaard, en décembre 2012, à Doha.
La commissaire européenne au climat, Connie Hedegaard, en décembre 2012, à Doha. REUTERS/FADI AL-ASSAAD

Sur le chapitre du financement, la Suisse, qui fait office de facilitatrice, a été contrainte de reconnaître qu’il "reste encore beaucoup de grosses différences de points de vue". Les pays en développement, qui souhaitaient que le chiffre de 60 milliards par an soit fixé comme objectif intermédiaire pour 2015, ont semble-il renoncé. Le chiffre ne figure pas dans le texte, qui évoque cependant l’obligation pour les pays industrialisés de "fournir des trajectoires de financement entre 2012 et 2020".

En 2009, l’accord conclu à Copenhague prévoyait que les pays en développement recoivent 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 pour financer leurs politiques d’adaptation au changement climatique et de réduction de leurs émissions.

Reste aussi à baliser la route jusqu’en 2015, date à laquelle les 195 pays présents à Doha se sont engagés à signer un accord global juridiquement contraignant. Entre la Chine qui défend une feuille de route la moins contraignante possible et l’Union européenne qui souhaite au contraire s’assurer que le processus de discussions sera bien encadré dès l’année prochaine, plusieurs scénarios restent ouverts.

L’une des options ambitieuses prévoit de parvenir à un projet d’accord à la fin de 2014. Mais comme toujours à ce stade de la négociation, il ne s’agit encore que d’une option. Rien ne dit qu’elle survive dans le "compromis équilibré" que le président Al-Attiyah espère encore voir sortir de la conférence.

Lire aussi L'émotion du négociateur philippin à Doha sauvera-t-elle la conférence de l'ONU sur le climat ?

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