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Interview. Mick Jagger : « James Brown est le plus grand performeur de tous les temps »

Soul music. New York 21 Juillet. Fringuant et très souriant Mick Jagger déboule au 56 étage du Mandarin Oriental à New York. En blazer bleu marine cintré sur une chemise parme à col ouvert, il ne parait décidément pas ses soixante-dix ans. D’humeur visiblement euphorique à l’idée d’entamer la première étape de promotion marathon en tant que producteur de Get On Up , biopic consacré au Parrain de la soul, l’électrisant James Brown alias Mister Dynamite entre autres surnoms.

Un film dont il est très fier. Cet après midi là, sa vie privée restera hors sujet. Qu’importe. Charisme instantané, phrasé soigné, humour et sens de la répartie, on a affaire à un pro qui donne juste ce qu’il faut.

Mick comment avez-vous été amené à produire ce biopic sur James Brown?

Mick JAGGER.-[ Riant] En fait ça n’a pas été facile, c’est le moins que je puisse dire. Déjà du vivant de James Brown, le producteur Brian Grazer avait essayé de le convaincre sans succès pendant des années. Brown était lunatique et changeait d’avis sans arrêt. Un coup il était partant, puis soudain hésitant ou voulant tout arrêter. Il avait une idée très spécifique de ce qui devait être montré à l’écran, exigeant des modifications sur certains points car il ne voulait pas être dépeint de manière trop négative, ce que je peux parfaitement comprendre. Bref. Après sa mort en 2006, tout s’est encore compliqué à cause des ayants droits de la succession qui étaient tellement nombreux. Il y avait des rivalités entre eux, des jalousies et par conséquent de nombreuses disputes. Impossible pour eux de se mettre d’accord! Mais Peter Offerman, un très bon ami et associé, a réussi à convaincre les héritiers qu’il était le candidat idéal pour faire aboutir un tel projet. C’est lui qui m’a suggéré au départ l’idée d’un documentaire. Il est d’ailleurs aussi givré que James Brown sur lequel il possède une connaissance encyclopédique, comme sur les Rolling Stones… J’ai tout de suite été partant mais un matin au réveil je me suis dit que ce serait mieux de faire un film. Je suis allé trouver Brian et nous nous sommes lancés à deux dans ce projet.

Quel a été votre rôle précis en tant que producteur?

Tout s’est joué sur plusieurs niveaux. Pour moi, l’essentiel est d’avoir au départ le meilleur scénario possible. Ce qui a été ici à mon avis le cas avec Get On Up. Mon but était avant tout rendre hommage à James Brown et de montrer l’homme derrière la légende, de manière impressionniste. En même temps je voulais que le public s’attache vraiment à lui, quoiqu’il fasse. Cet aspect là me tenait particulièrement à cœur. Car tout en lui n’est pas sympathique. Il a des côtés insupportables, détestables même. Surtout, il était impératif que Chadwick Boseman qui joue Brown, soit à la hauteur et convaincant. Il ne nous a pas déçus. Enfin, il y a eu le choix des chansons à sélectionner dans un répertoire de plusieurs centaines. Tout s’est fait en accord avec le réalisateur Tate Taylor dont j’avais beaucoup aimé La couleur des sentiments.

Que représente James Brown pour vous?

Il reste de loin l’un des plus grands performers de tous les temps. J’avais vingt et un ans quand je l’ai rencontré la première fois à l’Apollo de Harlem. Il m’a énormément influencé à plusieurs niveaux. Il n’a pas été le seul car il y eut Little Richard entre autres et avant lui, tous ces musiciens de blues et chanteurs gospel comme Sister Rosetta Tharpe, Big Bill Broonzy…Mais James Brown possédait vraiment une manière unique de danser et de se produire sur scène et je lui ai volé pas mal de trucs en fait! J’ai toujours admiré cette super énergie qu’il dégageait, la façon dont il se donnait toujours à cent pour cent, ses rapports avec le public, comment il mettait les spectateurs dans sa poche. Sans compter sa détermination et cette incroyable capacité à se réinventer et à expérimenter en musique.

James Brown a eu une enfance très dure …

À la différence de la mienne pour sûr. Mes parents ne m’ont pas abandonné comme les siens même s’ils n’étaient pas ravis que je veuille faire du show business. Pour eux, ça n’était pas une vraie profession. Le déclic en ce qui me concerne a eu lieu quand j’ai décidé d’arrêter la fac et de ne plus seulement jouer du rock and roll le week-end mais de chanter toute la semaine. Ça a été le vrai moment décisif. Puis mon premier album est sorti. J’ai eu beaucoup de succès…

Le film montre comment dans les années soixante, James Brown s’est mêlé de politique. Quelle est votre opinion sur les artistes s’impliquant ainsi?

Du moment qu’ils savent de quoi ils parlent, je ne suis pas contre. De tout temps, le job d’un artiste a été de se faire l’écho des changements de société et du monde dans lequel ils vivent. Alors s’ils ont envie d’exprimer leurs opinions politiques, c’est tout à fait okay pour moi.

Et si un jour, on devait faire un biopic sur votre vie…

À l’évidence, je préférerai qu’on ne privilégie pas que le côté négatif et sensationnaliste, ce qui est toujours un piège facile et racoleur. On aurait évidemment pu choisir un tel angle avec James Brown, mais ce n’était pas notre but.

Etes-vous un cinéphile ou un cinéphage?

Jeune adolescent, je me targuais d’être intello et j’allais voir tous les Kurosawa qui passaient au ciné-club de mon lycée. Le couteau dans l’eau de Polanski est l’un de mes premiers souvenirs marquants. J’ai donc été influencé par le cinéma étranger mais aussi bien sûr par le cinéma populaire britannique de cette époque lequel n’a absolument rien à voir avec James Brown [en riant]. Les comédies Ealing, les films de guerre…Mais je n’étais pas un grand fan de cinéma même si pendant cette période je voyais pas mal de films…

Et plus récemment?

J’aime énormément Ridley Scott. Il n’y a pas longtemps, j’ai vu Snowpiercer, le Transperceneige qui m’a impressionné alors que ce n’est vraiment mon genre préféré.

Envisagez-vous un jour d’arrêter de vous produire sur scène?

Je l’ignore. Comme vous savez, je suis actuellement encore en tournée, alors pour le moment je continue…. (Le Figaro)

 

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