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Interview. Le hip-hop fait son entrée dans le monde académique

CULTURE. La culture hip-hop a vu le jour dans les ghettos new-yorkais en 1973, et elle a fini par conquérir le monde. Le rap est devenu la pop musique d’aujourd’hui et influence aussi bien la chanson que la mode, le cinéma et le langage. Entretien avec Olivier Cachin, spécialiste du genre.

Qu’entend-on par hip-hop?
Olivier Cachin: Le hip-hop est un phénomène culturel autour de la parole, du mouvement, de la musique et de la peinture, soit le rap, le breakdance, le DJing et le graffiti.

Quand cette culture apparaît-elle? 
A New York au début des années 1970. Si l’on considère que le rock’n’roll est né en 1954 avec l’enregistrement de That’s alright (Mama) par Elvis Presley, alors on peut dire que le hip-hop est né en août 1973 à l’occasion d’une block party, une fête de quartier, organisée dans le quartier du West Bronx par la sœur du fameux DJ Kool Herc. Cette fête regroupait des artistes des quatre disciplines. Mais aucun d’entre eux ne se doutait de l’ampleur qu’allait prendre un phénomène qui ne dépassait alors pas les limites du quartier. Ils n’imaginaient pas que cette contre-culture de ghetto allait générer des super­stars multimilliardaires comme Jay-Z ou Eminem et devenir le principal moteur de l’industrie du divertissement.

Aujourd’hui, le hip-hop est principalement associé au rap. Les autres disciplines ont-elles été délaissées?Une bonne partie du rap a pris la direction du divertissement, tandis que le breakdance et le graffiti sont restés dans le domaine culturel et artistique. C’est assez normal, car la danse et la peinture sont des moyens d’expression moins directs que la musique, et ce constat n’est pas spécifique au hip-hop. Mais le succès est là aussi au rendez-vous: des artistes comme Basquiat et Keith Haring sont issus de cette culture, et certaines équipes de breakdance se sont rapprochées des compagnies de danse contemporaine.

Les USA sont la patrie d’une culture qui a conquis le monde. Existe-t-il d’autres terres de hip-hop particulièrement fertiles? 
La France est souvent considérée, et à mon avis à juste titre, comme le deuxième pays du rap. Le phénomène y est arrivé assez tôt, et la scène est aujourd’hui immense.

Vous venez parler de l’histoire du hip-hop lors d’une conférence organisée par l’UNIGE. Qu’une contre-culture soit invitée dans une institution fondée par Jean Calvin, qu’est-ce que cela vous inspire? 
Je le vois simplement comme une preuve supplémentaire du succès du phénomène. Un succès qui a ses bons côtés, car cette contre-culture parle à de très nombreuses personnes, mais elle est aussi devenue un business assez éloigné des idéaux et des préoccupations de ses débuts, quand les pionniers voyaient le hip-hop comme un phénomène de quartier.

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La place du hip-hop à l’université

La culture hip-hop a-t-elle sa place comme objet d’étude à l’université? 
Le point de vue de Jan Blanc, doyen de la Faculté des lettres

«Le hip-hop peut être considéré, selon le mot de l’anthropologue Marcel Mauss, comme un fait social total. Il concerne des arts très divers . Mais il est aussi, plus largement, un mouvement populaire, issu des banlieues désœuvrées du Bronx, qui, très tôt, a porté des revendications d’émancipation sociale et politique, liées à la lutte ou à la contestation des discriminations. A cet égard, le hip-hop fait écho à des problématiques qui traversent la société tout entière, la questionnant de l’intérieur, en mettant en évidence, par l’extrême ou par l’absurde, les logiques de son fonctionnement et de ses dérives. On comprend, dans ce cadre, que l’étude du hip-hop et des différentes formes qu’a pu prendre, et que peut prendre encore cette culture urbaine contemporaine, ait sa place au sein de l’université et, plus singulièrement encore, dans le cadre des humanités contemporaines.»

 

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